mardi 12 mai 2015

Question - réponse

Les prochains billets auront pour but de répondre à vos questions.

Quand avez-vous commencé à écrire et pourquoi avez-vous choisi ce métier ?

Mes premières histoires remontent à l’adolescence, en secondaire un, dans la classe de madame Jocelyne. Je me souviens qu’elle ne m’aimait pas tellement (c’était réciproque). Elle trouvait que mes cheveux étaient toujours décoiffés, mes ongles étaient sales, il manquait un bouton à blouse, ma jupe était trop courte, tachée, fripée, le bord décousu (elle avait une fixation sur ma jupe !), que je n’étais pas attentive à ses leçons, soit j’étais dans la lune ou bien en train de bavarder avec mes camarades. Bref, j’étais loin d’être sa préférée, sauf en devoir de composition (production écrite pour les plus jeunes que moi).

Madame Jocelyne a été la toute première à me dire que j’avais une plume intéressante. « C’est toi qui as écrit ça ? Tu ne t’es pas fait aider ? » me demandait-elle en me remettant ma copie annotée d’un air soupçonneux. Un jour, elle nous a soumis à un test de composition. Hou la la ! La classe au complet a regimbé. Un fin finaud s’est écrié : « Ce n’est pas dans le plan de cours, mademoiselle ! » Sourire en coin, madame Jocelyne a ignoré sa remarque et a exigé une page seulement sur un sujet de notre choix. Nous avions une heure devant nous pour lui remettre notre copie.

Mes camarades se sont absorbés à la tâche immédiatement. Madame Jocelyne se promenait dans les allées en jetant un coup d’œil sur les copies en passant. Elle s’est arrêtée à côté de moi. « Je constate que vous n’avez rien écrit encore, mademoiselle Gauthier ? » m’a-t-elle murmuré à l’oreille. « En panne d’inspiration ? » a-t-elle ajouté, le sourcil arqué. « Ou bien est-ce que ce test-surprise serait propre à confirmer mes soupçons ? » a-t-elle conclu comme l’aurait fait Miss Marple dans toute sa splendeur. Elle s’est redressée et je l’ai regardé s’éloigner en se dandinant. Ce test visait-il à me tester personnellement ?

Bon, il fallait absolument que je lui prouve la vérité. J’hésitais à commencer parce que j’avais trop de sujets en tête. Je ne savais pas lequel choisir. J’ai regardé l’horloge au-dessus du tableau noir. Hiiiii ! Il me restait moins de quarante minutes pour remettre au professeur un quelconque produit de mon imagination. Du calme ! Du calme ! T’es capable ! me suis-je dit en inspirant profondément. Une idée m’est venue soudain. Comme je n’avais pas le temps d’élaborer sur un thème en particulier, et puis, une page seulement ce n’était pas assez selon moi, j’ai simplement écrit sur… l’écriture. Comment je me sentais en écrivant, comment je m’y prenais pour écrire sur ceci ou cela, quels étaient les auteurs qui m’inspiraient, quelles étaient mes habitudes d’écriture et bla-bla-bla…

J’ai remis ma copie sur le bureau de mon professeur dans le temps voulu. D’accord, ce n’était pas l’histoire que j’aurais voulu écrire pour l’épater, mais l’exercice m’a révélé néanmoins que l’écriture me rendait extrêmement heureuse.

Demandez-vous à l’heure la plus silencieuse de votre nuit ; me faut-il écrire ? Creusez en vous-mêmes à la recherche d’une réponse profonde. Et si celle-ci devait être affirmative, alors bâtissez votre vie selon cette nécessité. Rainer Maria Rilke – Lettre à un jeune poète

2 commentaires:

  1. Et Madame Jocelyne a enfin compris que la jupe obsédante appartenait à une auteure?
    Diana

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  2. En cette fin d'année-là, j'ai reçu le prix d'excellence pour le meilleur récit. ;-)

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